Comment transcender ses peurs – Rencontre & Interview de Pilou Ducalme

« Sans nos rêves nous sommes morts » Kilian Jornet

Il y a des rencontres qui vous marquent, qui laissent en nous des images, des émotions, des interrogations et en même temps beaucoup de simplicité et d’évidence. 

J’ai mis du temps à écrire suite à ma rencontre et à mon interview de Pilou Ducalme. Pourquoi… ?

Peut-être qu’il faut parfois ce temps pour se jeter à l’eau, ce temps pour trouver les mots justes et les mots qui sauront mettre suffisamment dans la lumière ces histoires d’hommes qui mettent dans leur ordinaire de l’extraordinaire. 

Nous ne savons jamais ce que nous réserve l’heure qui vient. Pour certains d’entre nous cela raisonne encore plus fort et guide en grande part leur quête de défier les expériences et l’existence.

Pilou fait partie de ces gars-là…ces gars qui se sentent terriblement vivants dans l’adversité et dans la force des émotions. 

La Rencontre 

Ce jour-là, j’avais les bras chargés de plantes pour peaufiner ma terrasse. Pilou aurait pu s’arrêter et juste me dire bonjour, mais il m’a spontanément proposé de l’aide pour aménager ma terrasse, en m’apportant des bambous, un pot et de l’engrais… Pilou est jardinier !

Nous passons plus de 2 heures sur ma terrasse à planter, agencer et discuter ! Une humilité extraordinaire se dégage de lui.

Dans la discussion nous parlons vagues et surf, mais je suis à mille lieux de me douter que j’ai devant moi un homme qui a surfé les plus grosses vagues de la planète ! A aucun moment il ne s’est mis en avant. A aucun moment je ne me suis imaginée ce que cet homme avait accompli.

En revanche ce qui se dégage de lui a terriblement attisé ma curiosité. Une fois parti je regarde sur internet qui est Pilou Ducalme…et là je n’en reviens pas…un sourire habille mon visage.

Wouahhhh…Il était évident que j’interviewerai un jour ce personnage pour en découvrir davantage. L’envie de mieux comprendre et de découvrir avec lui ce gout irraisonné pour ces immersions profondes et le risque !

Des oiseaux et des vagues

Quand tu échanges avec Pilou il t’explique que les mouettes et les goélands annoncent l’arrivée des vagues. Il continue en livrant l’un des plus beaux moments de sa vie : quand il a frôlé la mort à Mavericks et la description de ce bruit si particulier. Il fait le parallèle entre ce bruit sourd de l’énorme vague qui aurait pu le tuer et la respiration en remontant à la surface qui se rapproche de la naissance d’un nourrisson.

La force des éléments, l’univers du sensible, et au bout l’image de la vie… 

@Greg Rabejac

Surfeur de gros

Quand on parle du surf de gros il faut redire en quoi cela impose vraiment de repousser ses limites.

Gibus De Soultrait lui-même explique que « le gros surf ne s’improvise pas et nécessite d’avoir « la caisse » et de savoir 2, 3 choses: À partir de 3 m, ça devient gros. Au-dessus de 4 m, c’est très gros. À 6 m et plus, c’est le territoire des « big wave riders ».

Pour vous et moi l’image de vagues gigantesques aux dimensions XXL éveillerait sacrément notre questionnement non… ? Cela nous ferait rebrousser chemin même, vous ne croyez pas… ?

Pilou lui c’est cela qui l’attire infiniment.

Le plus fou dans tout ça c’est que l’on pourrait se dire : « Rolala ce gars-là il n’a peur de rien! » Et bien non en fait car ce gars-là c’est justement cette peur qui le fascine et l’attire plus que tout. Quand nous parlons de la peur, ce qui est intéressant c’est que je remarque que cela produit le même effet que sur Mathieu Crépel et Pierre Frechou que j’ai pu interviewer précédemment.

C’est comme si cette émotion les stimulait ! Ils ont besoin de bouger, de se dépasser. Elle peut se manifester AVANT, mais JAMAIS pendant et c’est un élément que je retrouve très souvent avec mes patients. La peur « à l’idée de… », mais dès que nous sommes sur le moment, dans le vif du sujet c’est comme si c’était notre corps qui prenait le dessus et alors on y va, la peur devient énergie ! 

De l’émotion à l’énergie de vie

Ce dont Pilou se rappelle ce sont davantage les moments passés SOUS la vague que SUR la vague ! Il ouvre les yeux sous l’eau, comme pour voir ce qui s’y passe et rester connecté au présent. 

Ce shoot d’adrénaline, de drogue naturelle provoque une addiction chez Pilou. Il a besoin de « sa dose » annuelle de grosses vagues !

D’où vient cette envie de se dépasser ? Pilou me partage le fait d’avoir été rabaissé jeune « Tu n’en es pas capable » … Comme si cette phrase raisonnait encore en lui et lui donnait la hargne. L’énergie de se prouver quelque chose. Cet enthousiasme qui exulte c’est aussi l’envie et le besoin de partager. Vous croisez Pilou, il vous dit bonjour, et c’est ensuite le premier à demander de vos nouvelles et à vous donner des conseils.

Il me confie ce besoin fort de faire plaisir, de partager, d’être avec les autres. 

Quand nous parlons de gestion des émotions, il m’avoue que pour lui un homme fort c’est un homme capable de pleurer. Capable d’accepter toutes les dimensions de ses émotions. Et pour faire du surf de gros, il faut aimer « en prendre plein la gueule ». Ce n’est pas que le kiff d’être sur cette magnifique vague, il faut d’abord passer et accepter ses émotions même les plus désagréables. D’ailleurs, si l’on reprend l’image d’une naissance : un accouchement se fait dans le bonheur, mais aussi avec sa part de douleur ! 

Pilou c’est finalement l’histoire d’un dompteur de vagues qui transcende ses émotions dans l’écume pour nous apprendre que l’essentiel c’est d’être terriblement soi-même pour encore mieux donner aux autres !

Pour aller plus loin:


Cet article a été rédigé par Mathilde Depaulis avec la collaboration d’Alexia Lamouret.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager ou à laisser un commentaire !


@James Panter